Silence

Publié le par ZorgBlog

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Dans la campagne Ardennaise, à Beausonge plus précisément, un petit village, les pouvoirs des rebouteux, et autres sorciers sont reconnus bien plus que la médecine moderne. Un village profondément ancré dans des croyances qui peuvent sembler totalement absurdes, mais vous pourriez être surpris ^^.

silence pl1C'est là que vit Silence, un muet que beaucoup jugent simplet, l'idiot du village en quelque sorte. Il est l'homme à tout faire (l'esclave?) d'Abel Mauvy, le plus important exploitant agricole du coin. Celui que Silence appelle son "maître", cet Abel Mauvy, est un être assez abject, exploitant, brimant et rabaissant constamment Silence en le traitant d'idiot, d'imbécile ou de bâtard...mais cela ne dérange absolument pas Silence, qui ne connaît pas ce qu'est la haine, la colère ou la vengeance, non, il ne ressent pas ce genre de choses, lui ce qu'il aime c'est la nature et les animaux avec lesquels il semble pouvoir communiquer.

Mais la rencontre avec "la sorcière" va changer le cour de sa vie, il va découvrir le terrible secret que cache le village, la vérité sur son passé et des sentiments jusque là inconnus.

 

Comment ne pas avoir d'empathie pour ce personnage qu'est Silence ? On a tellement envie de le défendre, de l'aider à se libérer d'Abel Mauvy et des autre villageois qui ne cessent de se servir de lui ! Un récit poétique, onirique, fantastique et particulièrement touchant qui nous fait pas mal réfléchir sur la différence, sur l'acceptation de l'autre...la tolérance.

Le récit est assez vivant, il y a pas mal de rebondissements mais la force du récit réside essentiellement dans le personnage naïf de Silence auquel on s'attache très vite, et que l'on suit avec souffrance,  tendresse, et parfois même, avec compassion.

 

Techniquement, le dessin est un savant mélange entre Hugo Pratt et Jacques Tardi.

Le trait est particulier, et comme souvent il peut dérouter, les visages sont très figés, peu expressifs, et les personnages parlent comme ils pensent : lèvres fermée (mais ils ont ce regard silencieux que l'on retrouve dans les personnages d'Hugo Pratt). Malgré cela, Comés à une façon de dessiner les paysages qui est assez géniale, et son utilisation du noir et blanc est magistrale. 

 

Le Silence de Didier Comés est un chef d'oeuvre universel, intemporel, il a aujourd'hui 30 ans et pourtant le thème de l'intolérance est plus que jamais un sujet d'actualité.

Il y a des BD comme ça qui vous touche particulièrement, pas un truc à vous faire changer de vie, non, mais quand même, vous refermez l'album et vous restez à contempler la couverture ou le quatrième plat en cogitant...voilà c'est fini, Silence.

 

N.D.R: En octobre 1983, dans le N°55 des "cahiers de la bande dessinée,  Didier Comés confié à Thierry Groensteen, le message qu'il avait voulu faire passer au travers de cet album: mission accomplie.

 

«Je voulais illustrer le problème de l'incommunicabilité, et plus précisément de la méfiance instinctive à l'égard des gens "différents", méfiance qui débouche souvent sur la violence. Personnellement, j'ai toujours éprouvé une forme de tendresse envers les êtres marginaux, quels qu'ils soient. Peut-être parce que moi aussi, je me range dans cette catégorie. Le seul fait d'aimer le jazz, dans un petit village aux moeurs assez rigoristes, passait, sinon pour une perversion, au moins pour une bizarrerie.»

[Didier Comés]

 

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Publié dans Casterman

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